Perdre son emploi et rentrer chez Soi

Il y a quelques années, j’étais encore salariée dans une entreprise. Vue de l’extérieur, j’avais l’air de m’en sortir plutôt bien entre le travail, la vie de famille et les activités des uns et des autres. En réalité, j’avais mal à mon rythme intérieur. Une petite voix de sagesse en moi me répétait : “si tu continues à ce rythme, tu vas avoir un problème de santé un de ces jours », mais je la balayais aussitôt : “plus tard, plus tard, si les circonstances sont favorables…” 

Et puis, j’ai été licenciée économique. Je me suis retrouvée comme beaucoup sur le bord de la route, complètement sonnée. Comme un hamster qui venait de descendre de sa roue. J’étais encore dopée à l’adrénaline, mais je commençais à sentir l’épuisement de ces années de course folle. J’étais comme ces terres qui ont produit des récoltes à coup d’engrais mais dont le sol n’a plus rien de vivant.

Pas facile de se retrouver chez soi dans le silence de sa maison quand on est habitué au rythme trépident de l’entreprise. Que FAIRE ? Par quel bout commencer ? C’était en journée. Tout était silencieux. J’ai erré de pièce en pièce. Dans une chambre, je me suis approchée d’une fenêtre, et sur une impulsion, je me suis allongée sur la moquette.
J’ai plongé mon regard dans le ciel et les nuages. Il y avait du vent, le spectacle était moutonnant et magnifique. Mon regard s’est absorbé dans la contemplation, puis mon être tout entier. Le temps s’est suspendu. J’ai oublié qui j’étais, où j’étais. J’ai atterri dans le moment présent.

Les secondes ont passé et une émotion est montée. J’avais les larmes au bord des yeux, pas des larmes tristes, non, des larmes de coeur touché, celles d’une personne qui retrouve un trésor qu’elle croyait perdu. Je me suis sentie de retour à la maison, au contact de mon être profond pour la première fois depuis longtemps.

Ce ne fut qu’un bref moment, cela ne transforma pas ma vie d’un coup d’une baguette magique, mais ce moment scella en moi une décision : cultiver cette connexion, cultiver ces moments qui permettent de ressentir la joie simple d’être en vie. La joie d’être uni à d’infinis espaces. J’avais perdu mon emploi mais je venais de retrouver la route du Soi.

Depuis, il n’est pas un jour sans que je me perde mais je dirais plutôt sans que je me trouve dans la contemplation de la nature : les mouvements de balancier des branches d’arbre, les mésanges dans le jardin, les jeux de lumière dans les feuillages, les saisons qui passent, les nuages aussi, les lunes, les variations de ciel et de lumière… M’immerger dans la contemplation de la nature m’ouvre à chaque fois une porte vers le moment présent, et le fait d’être tout simplement, sans chercher à faire.

La contemplation de la nature peut vous libérer de ce moi, le grand fauteur de troubles.  Eckhart Tolle – L’art du calme intérieur

Je me suis aussi créée des occasions d’approfondir le contact avec mon être profond comme cette retraite de sept jours au Village des Pruniers, un centre de pratique de la pleine conscience, fondé par le maître zen vietnamien Thich Nhat Hanh. Ce village accueille tout au long de l’année des laïcs qui partagent la vie du monastère. Nous sommes invités à cultiver la pleine conscience aussi bien en méditation assise, que pendant les promenades ou la participation aux travaux collectifs (préparation des repas, ménage, rangement…). Ce fut très fort pour moi venant de la société du faire de vivre le temps d’une semaine dans une société fondée sur l’être et la bienveillance. Prendre ses repas en silence, par exemple. Chanter en groupe des petites chansons pour entrer en pleine conscience dans le travail…

J’ai ensuite beaucoup cherché à ancrer tout cela au coeur de mon quotidien. Je vis en région parisienne, c’est un peu le grand écart. J’ai veillé à ralentir le rythme, à mettre moins de choses dans l’agenda pour laisser de l’air dans mes journées et mes semaines, pour être moins stressée et pour pouvoir faire mes tâches quotidiennes, même les plus basiques (courses, repas, ménage…) en étant plus dans le moment présent. J’ai suivi une formation de méditation pleine conscience, le programme MBSR sur plusieurs semaines, qui m’a donné l’impulsion pour pratiquer la méditation ou, pour le moins, l’état de pleine conscience plus régulièrement dans mon quotidien.

Et peu à peu, au fil des mois, mes peurs en lien avec mon avenir ont perdu en intensité. J’ai aussi l’impression de mieux me connaître, de savoir ce qui me ressource, ce qui fait danser mon âme, de moins me comparer aux autres, de moins mettre ma valeur dans mon image sociale, mais plus dans ma vie intérieure et dans ce que me souffle mon inspiration. Tout n’est pas rose tous les jours, je suis bien sûr encore en proie aux doutes et aux peurs, mais je les accepte mieux. Et je sens que ma terre intérieure lessivée par le stress a pu se régénérer en profondeur, qu’elle est mûre pour que de nouvelles graines germent et grandissent. Et cela me remplit d’une joie profonde.

Puisse ce partage semer des graines d’inspiration…

Avec toute mon âmitié,

Emmanuelle

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